Chroniques

Mon père et son mandat en cas d'inaptitude

Votre père vieillissant perd la mémoire et ses facultés diminuent de telle sorte que vous croyez qu’il devient inapte à prendre soin de lui-même et à administrer ses biens. Ayant préparé un mandat en prévision de son inaptitude, vous nommant mandataire. Que devez-vous faire pour être autorisé à agir en vertu de ce mandat?

Les faits
La fille d’un homme de 80 ans demande au tribunal de déclarer son père inapte à prendre soin de lui-même et à administrer ses biens. Elle demande que le tribunal homologue le mandat en cas d’inaptitude signé par son père le 12 février 1991 afin de le rendre exécutoire. Le mandat en question est valide et conforme aux exigences de la loi. Par les termes de celui-ci, il nomme sa fille mandataire principale. Son frère et son père croient que la demande est prématurée et qu’il n’est pas inapte. Le frère prétend qu’il représenterait mieux son père, ayant ses intérêts plus à cœur, et demande à être son mandataire s’il était déclaré inapte.

Le père est-il inapte à prendre soin de lui-même et à administrer ses biens? Le mandat donné en prévision de son inaptitude doit-il être homologué par le tribunal dans son intégralité?

La décision
Le tribunal en vient à la conclusion que le père est devenu inapte et n’est plus en mesure de prendre soin de sa personne et d’administrer ses biens. En conséquence, la requête en homologation d’un mandat en prévision de l’inaptitude est accueillie. Le tribunal procède à la nomination de la fille du mandant à titre de mandataire, conformément aux termes du mandat.

Les motifs
Selon le principe général, toute personne majeure est considérée comme étant capable d’exercer ses droits civils et de s’occuper de sa personne. Par contre, lorsqu’une personne devient inapte, l’ouverture d’un régime de protection doit être demandée. Le Code civil du Québec dicte les règles applicables lorsqu’il devient nécessaire de rendre exécutoire un mandat en cas d’inaptitude. L’objectif de ces règles est d’assurer l’intérêt du majeur, le respect de ses droits et la sauvegarde de son autonomie. Dans un premier temps, le tribunal doit constater l’inaptitude du majeur en évaluant la preuve médicale qui doit démontrer que l’état pathologique du père engendre une perte d’autonomie significative, tant au plan physique que psychologique. Le tribunal doit également évaluer le niveau d’incapacité de la personne afin d’apprécier si le mandat est complet et respecte ses intérêts et, dans le cas contraire, fixer un régime de protection plus approprié selon le degré de protection requis. Dans la présente cause, l’inaptitude du père a été établie. De plus, la preuve révélait que le mandat était valide et qu’il permettait d’assurer une représentation adéquate étant donné la situation et les besoins du père. Finalement, sa fille, mandataire principale désignée selon les termes du mandat, a été jugée tout à fait apte à agir comme mandataire.

Références
M.(L.) c. M. (J.), Cour supérieure (C.S.) Joliette 705-14-000215-959, 1996/03/08, greffier : Me Normand Martel (J.E. 96-971)

Code civil du Québec, (L.Q., 1991, c. 64), art. 1, 4, 256, 258, 273, 276, 1409, 2155.
Code de procédure civile, (L.R.Q. c. C-25), art. 884.1 et ss

Recherchez un sujet

Urgence
droit criminel

2024 – Tous droits réservés – AIDE JURIDIQUE ESTRIE