Après quelques années de vie commune, vous décidez de vous séparer du père de vos enfants. Vous croyez que vos enfants devraient demeurer la majorité du temps avec vous, tandis que leur père croit qu’ils devraient partager leur temps entre votre domicile et le sien. De surcroît, vos domiciles sont éloignés l’un de l’autre. Comment le juge partagera-t-il le temps de garde?
Les faits
Un homme et une femme font vie commune pendant quelques années. De cette union sont nés deux enfants. Peu de temps après la naissance du deuxième, le couple décide de se séparer alors que les deux enfants sont âgés de seulement 3 ans et 1 an. La mère demande la garde exclusive des enfants et le père demande la garde partagée. Dans certaines situations, des ordonnances dites intérimaires doivent être rendues en urgence afin de sauvegarder les droits des enfants ou des parties avant que l’audition de leur cause ne soit entendue. Dans le présent cas, un tribunal a d’abord décidé de mesures
intérimaires en accordant la garde à la mère et des droits d’accès au père d’une fin de semaine sur deux, du vendredi au mardi. Malgré le fait que la mère ait déménagé à Beauport avec les enfants et que monsieur ait continué d’habiter à Laval, ce dernier démontre, au moment de l’audition, qu’il a exercé rigoureusement ses droits d’accès. La mère allègue la mauvaise communication entre elle et le père, la distance considérable entre les deux domiciles et le fait que la garde partagée impliquerait la fréquentation de deux garderies.
Le litige
À la lumière des faits du dossier, et plus particulièrement vu la distance de 250 kilomètres séparant les domiciles des parents, la garde partagée sera-t-elle accordée?
La décision
Le juge accorde au père et à la mère la garde partagée de leurs enfants d’âge préscolaire, d’un vendredi à l’autre.
Les motifs
En matière familiale, aucun mode de garde n’est privilégié par les tribunaux. L’évaluation de la situation se fait au cas par cas. L’intérêt des enfants est le critère impératif qui doit guider le juge dans sa décision. Dans la présente cause, les parents possèdent tous deux d’excellentes capacités parentales. En effet, ils sont présents auprès de leurs enfants et s’assurent que ces derniers ne manquent de rien. Certes, ils ne sont pas toujours d’accord sur la façon de les éduquer, mais en général, il n’y a pas de désaccord majeur sur le sujet. Malgré la tentative de la mère de dépeindre le père sous un mauvais jour, le tribunal ne retiendra pas sa version. L’obstacle le plus sérieux à la garde partagée, dans la présente cause, est la distance (250 kilomètres) qui sépare les résidences des parents. Par contre, depuis la séparation, le père effectue régulièrement le voyage avec les enfants et rien ne permet de croire qu’ils en ont subi des inconvénients importants. De plus, le père n’a raté aucun de ses droits d’accès. Il a également entamé des démarches pour s’installer éventuellement dans la région de Québec afin de maintenir une garde partagée lorsque les enfants iront à l’école. Le
juge en vient donc à la conclusion qu’il y a lieu d’accorder la garde partagée. Il ordonne à chaque parent d’aller chercher, à ses frais, les enfants à la garderie de la ville de l’autre parent le vendredi à compter de 13 h.
Références
C.L. c. M.R., Cour supérieure (C.S.) Laval 540-04-005454-027, 2002/11/22, juge : Claude Champagne (J.E. 2003-10; www.jugements.qc.ca).
Code civil du Québec (L.Q., 1991, c. 64), art. 33.