Des ambulanciers se sont présentés chez moi et ils m’ont conduit à l’hôpital alors que je refusais de m’y rendre. À mon arrivée, les médecins ont refusé de me laisser partir et ils ont décidé de me garder malgré le fait que je m’opposais fermement à mon hospitalisation. Peut-on me garder à l’hôpital contre mon gré?
Les faits
L.L. est âgée de 50 ans et souffre de schizophrénie paranoïde depuis de nombreuses années. Sa famille s’inquiète de son état mental du fait qu’elle s’est fait évincer de son logement et ne prend pas sa médication de façon régulière, selon eux. Dans ce contexte, elle est donc transportée à l’hôpital. À son arrivée, L.L. est placée sous garde préventive pour une période de 72 heures puisque les médecins psychiatres considèrent qu’elle présente un danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui en raison de son état mental. Comme on veut la garder pour une plus longue période, l’hôpital s’adresse au tribunal pour obtenir une autorisation de la garder contre son gré pour une période maximale de 90 jours. L.L. est représentée par procureur et conteste cette requête du centre hospitalier.
Le litige
L.L. présente-elle un danger pour elle-même ou pour autrui en raison de son état mental? Dans l’affirmative, sa garde en établissement est-elle nécessaire?
Les motifs
En preuve, l’hôpital dépose deux rapports d’examens cliniques psychiatriques qui concluent à la nécessité de la garde en établissement. En matière de garde en établissement, l’hôpital a le fardeau de prouver que la personne est dangereuse pour elle-même ou pour autrui en raison de son état mental, de même que la nécessité de sa mise sous garde.
L.L. témoigne longuement devant le tribunal et est en mesure de répondre adéquatement aux questions qui lui sont adressées. Elle remet également plusieurs éléments contenus dans les évaluations psychiatriques dans leur contexte.
Bien que L.L. n’ait pas soumis de contre-expertise psychiatrique indépendante, le tribunal conclut que la preuve n’a pas été faite que L.L. présente un niveau de danger pour elle-même ou pour autrui qui justifie sa garde en établissement. L.L. ne tient pas de propos suicidaires et n’a pas d’idées hétéro-agressives. Le tribunal rappelle que les évaluations psychiatriques qui sont produites au soutien de la requête pour garde en établissement doivent être détaillées et motivées, ce qui n’est pas le cas ici. La garde en établissement est une importante atteinte à la liberté d’une personne et elle ne peut être autorisée sans des raisons graves et sérieuses. Après analyse de la preuve qui lui a été soumise, le tribunal rejette la requête de l’hôpital.
Références
Centre de santé et de services sociaux de Rimouski-Neigette c. L.L., Cour du Québec (C.Q.) Rimouski 100-40-000410-088 2008/09/29, juge : Guy Ringuet. (www.jugements.qc.ca)
Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui, (L.R.Q., chapitre P-38.001), art. 9
Code civil du Québec, (L.Q. 1991, c. 64), art. 30